Evaluation - Lettre ouverte de l'ADERE et de l'AFPSSU au Ministre de l'éducation
Lettre ouverte au Ministre de l’Education nationale, de la Jeunesse et de la Vie Associative
Monsieur le Ministre,
Nous avons appris par les médias que vous auriez l’intention de formaliser l’évaluation en fin de grande section de maternelle en incitant les enseignants à classer les élèves en trois catégories : « RAS », « à risque » et « à haut risque ». Les écoles maternelles seraient ensuite répertoriées en fonction des résultats obtenus. *
Cette utilisation de l’évaluation est contraire à l’article 24 de la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union européenne .
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C’est pourquoi, en tant que section française de l’AEDE (Association Européenne De l’Education-France), et qu’Association Française de Promotion de la santé scolaire et universitaire (AFPSSU) nous souhaitons vous faire part de nos interrogations devant cette proposition.
Il est certes nécessaire que les enseignants puissent identifier les difficultés des enfants au moment où il est encore assez facile de les aider à les surmonter, ou que des solutions de soutien soient trouvées pour compenser certains retards ou certains handicaps. C’est d’ailleurs ce qu’ils font déjà. Mais ne craignez-vous pas que l’étiquetage sommaire « à risque » ou « à haut risque » entraîne des effets néfastes pour les enfants, leurs parents et même leurs enseignants ?
Pour bien apprendre, pour se développer harmonieusement, les enfants ont besoin d’un climat de confiance et de sérénité. Pour bien accomplir leur mission d’enseignement et d’éducation, les enseignants ont besoin que la société leur fasse confiance.
Ne pensez-vous pas qu’il serait plus efficace, moins stigmatisant, de mieux former les enseignants ? De ne pas supprimer les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficultés (RASED), mais plutôt d’en simplifier et d’en améliorer le fonctionnement ? D’augmenter le nombre de médecins et de psychologues scolaires ? D’encourager les groupes d’aide parents-enseignants, qui fonctionnent avec succès dans certains établissements ?
Si l’on regarde ce qui se pratique dans d’autres pays de l’Union européenne en matière d’évaluation et d’orientation, on s’aperçoit que les résultats sont meilleurs lorsqu’un regard positif est posé sur les élèves : repérer les points forts, les talents, encourager les efforts, donner des objectifs atteignables, accompagner la persévérance, renforcer le sentiment d’efficacité personnelle, apporter aide et soutien dans les difficultés, valoriser les progrès… en un mot, de nourrir le plaisir de grandir et la curiosité d’apprendre. Regardez du côté de la Suède, du Danemark, de l’Espagne, de la Finlande…
L’enseignant se doit d’évaluer. En évaluant, il repère les points forts de chaque élève, points forts sur lesquels il peut s’appuyer pour aller plus loin ; il recueille les informations nécessaires pour lui apporter les meilleurs ingrédients pour son développement personnel, intellectuel, social –et, par la suite, professionnel. Mais il ne peut additionner, pour en faire un total cohérent, des éléments aussi disparates que le comportement d’un enfant de 5 ans dans la cour de récréation, sa capacité à reconnaître des phonèmes ou son habileté à tracer des lettres. Le risque est de donner à des éléments parfois secondaires un caractère déterminant pour le futur de l’enfant.
L’évaluation ne doit pas agir comme une machine à trier, à dévaloriser, à humilier ; un classement des enfants en catégories, dès l’âge de 5 ans, serait contraire à tout ce qui est connu du développement de l’enfant, de la plasticité de l’enfance. Il faut préserver les possibilités d’évolution de chaque individu, en apportant aide et soutien dans un cadre structuré et bienveillant.
C’est pourquoi, Monsieur le Ministre, l’AEDE-France vous demande de bien vouloir prendre en compte les remarques énoncées ci-dessus. Sachez que notre seul souci est de contribuer à la réussite de tous les élèves.
Le 17 octobre 2011
Dr. Marie-France Mailhos, présidente de l’AEDE-France
Dr. Claude Bravard, présidente, Dr. Marie Claude Romano, secrétaire générale de l’AFPSSU
AEDE-France
10 Place du Parlement de Bretagne
35000 Rennes
http://www.aede-france.org
06 89 97 04 55
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AFPSSU
tél : 06 07 99 26 92